Les avocats de Cédric Jubillar réclament sa remise en liberté et dénoncent « une catastrophe judiciaire »

Ce mardi matin, l’affaire de la disparition de Delphine Jubillar était à nouveau au cœur d’une audience de la chambre d’instruction de la cour d’appel de Toulouse. Pour la quatrième fois, le mari de l’infirmière, disparue dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020 à Cagnac-les-Mines dans le Tarn, faisait appel du rejet de sa demande de remise en liberté. Le plaquiste de 34 ans est mis en examen et placé en détention depuis le 18 juin dernier pour le meurtre de sa femme et saura le 22 mars si sa demande est à nouveau rejetée.
Neuf mois après son incarcération, Cédric Jubillar s’est donc présenté devant la cour dans un pull gris foncé bigarré, une barbichette noire cachée derrière son masque. Lors d’une audience à huis clos, ses avocats ont à nouveau pointé un dossier « vide ». C’est « la chronique annoncée d’une catastrophe judiciaire, on s’en rend compte maintenant », a réagi Alexandre Martin, l’un des trois avocats du plaquiste qui continue à clamer son innocence. « C’est une instruction qui patine, on va de révélations médiatiques en révélations médiatiques qui en définitive ne révèlent rien. Ça fait neuf mois que les investigations sont menées dans tous les sens, au point de se contredire : on nous dit que c’est la voiture de Delphine qui a servi à transporter le corps, puis celle d’un copain. En fait les enquêteurs ne savent pas », a lâché le pénaliste à l’issue de l’audience qui a duré près de trois heures.
« Il y a des traces de sang, mais pas humain »
Ce dernier fait en particulier référence aux expertises de la voiture de l’ami de Cédric Jubillar. Ce véhicule, suspecté par les enquêteurs d’avoir pu servir à transporter le corps de Delphine Jubillar, a été analysé de fond en comble. « A ce jour, il est faux de dire qu’il y aurait eu des traces de sang retrouvées dans un quelconque véhicule. Les investigations dans celui du copain ont montré qu’il y avait sept traces de fluides biologiques. Les tests réalisés en décembre pour savoir s’il y avait du sang humain ont été négatifs, rien n’a réagi », a appuyé Me Emmanuelle Franck, autre avocat de la défense pour qui il n’y a « aucun élément pour contredire l’innocence de Cédric Jubillar ».
Rien de plus non plus au niveau de la couette dont se servait l’infirmière pour dormir sur le canapé du couple. « Il y a des traces de sang, mais pas humain, rien, pas d’ADN exploitable. C’est certainement du sang des chiens », poursuit l’avocate.
Demande expertise sur la téléphonie mobile
En revanche, Me Emmanuelle Franck regrette que les juges d’instruction n’aient pas plus poussé les expertises concernant le téléphone de l’infirmière, grâce aux données Google qui ont pu être récupérées. Un portable qui s’est déclenché à plusieurs reprises dans la nuit du 15 au 16 décembre. Que ce soit peu après minuit, lorsque l’application WhatsApp a fonctionné, puis vers 1h30 lors du déclenchement de la caméra ou encore à 6h52 lorsque l’accès au bureau du téléphone a été déverrouillé. « C’est un horaire qui nous intéresse car à cette heure-là, Cédric Jubillar est avec les gendarmes. On sait aussi qu’il n’a pas les codes de déverrouillage du téléphone de Delphine car elle les avait changés quelques jours auparavant. Pour le déverrouiller, sinon, il faut l’empreinte du doigt », explique Emmanuelle Franck.
Les sols à proximité de Cagnac-les-Mines continuent d’être sondés
Pour savoir comment fonctionnait ce mobile, les experts ont acheté, en avril 2021, le même appareil. Ils souhaitaient voir si tous ces déclenchements étaient dus à une intervention humaine ou aux applications. « Le 15 mai, ces experts ont indiqué aux juges d’instruction qu’ils avaient besoin de plus de temps. Elles leur ont dit qu’elles leur laissaient quinze jours, les experts ont dit qu’en quinze jours ils ne pouvaient rien faire. Ça nous fait rager car c’est une expertise qui ne pouvait être qu’à décharge », plaide l’avocate qui a demandé aux juges d’instruction de relancer cette expertise.
Sur le terrain, après trois semaines de fouilles en début d’année, les gendarmes continuent de sonder les sols à proximité de Cagnac-les-Mines, afin de retrouver le corps de l’infirmière. Une priorité pour les parties civiles.
« C’est long mais nécessaire. Il y a toujours ces drones qui font des recherches aussi, c’est important pour les enfants qui sont en quête de vérité, il faut qu’ils puissent faire leur deuil. On aimerait que les investigations aillent jusqu’au bout et qu’on se batte pour retrouver le corps », a de son côté indiqué Me Malika Chmani, avocate de l’administrateur ad hoc, désigné pour que les enfants du couple soient représentés dans la procédure. Pour cette partie civile, aussi dur que cela puisse être pour le petit Louis et la petite Elyah, la sortie de Cédric Jubillar « est prématurée », « il ne dit pas toute la vérité ». De son côté, le parquet général a requis à nouveau son maintien en détention.