Entre panique et crise boursière, c’est la ruée vers l’or



Si le déclenchement de la guerre en Ukraine a fait exploser les cours de l’or noir, le jaune est loin d’être en reste. Alors que la once d’or (à peu près 31 grammes du précieux métal) était à environ 1.800 dollars américains début janvier, elle a atteint un premier pic le 24 février, jour de l’invasion russe, puis un véritable sommet début mars à environ 2.050 dollars. La hausse des cours découle directement d’une augmentation des achats d’or, « souvent étroitement liée à une situation de panique en raison d’une crise géopolitique ou financière », analyse l’économiste indépendante Véronique Riches-Flores. Il se trouve que le conflit en Ukraine réuni les deux avec à la fois une instabilité sur le continent et l’effondrement des bourses européennes.

En Russie, la demande de la population pour l’achat de lingots d’or physiques a tellement augmenté, que la Banque centrale russe a même décidé lundi de suspendre ses achats d’or auprès des banques afin qu’elles puissent satisfaire la demande des particuliers. En France, Jonathan Fhal, directeur de Godot & Fils, entreprise spécialisée dans le négoce de métaux précieux, note le même engouement dans les 45 boutiques que compte le groupe. « Les achats au comptoir ont été multipliés par quatre au mois de mars et par dix via notre plateforme internet », assure-t-il, confirmant bien que ce rush brutal sur le noble métal cache des achats précipités liés aux événements en Ukraine. Le même phénomène s’était déjà produit pendant l’épidémie de covid-19, le Brexit et la crise des subprimes. « Les gens prennent peur pour leur épargne, pour leur capital, ils se demandent si leur argent en banque est en sécurité », détaille-t-il, constatant que beaucoup de Français cassent leur assurance vie pour la convertir en or.

Le roi des monnaies

Mais pourquoi l’or plutôt que des cryptomonnaies par exemple ? D’abord parce que l’or rassure par sa stabilité. « C’est un actif refuge, en partie parce qu’il est tangible et garde sa valeur, notamment face à l’inflation, détaille Véronique Riches-Flores. En cela, il est moins exposé aux périodes de crise. » Contrairement aux monnaies virtuelles ou aux actions, on n’achète pas de l’or en espérant faire des bénéfices par la suite. « Ce n’est pas du tout un achat spéculatif, mais un moyen de sécuriser son épargne, commente Jonathan Fhal. Les gens sont contents s’ils le revendent au même prix vingt ans plus tard. » Loin des hausses et des baisses vertigineuses du cours des cryptomonnaies, celui de l’or varie toujours faiblement, malgré des pics occasionnels.

« L’or a toujours été considéré comme un moyen de se prémunir des risques d’inflation et de la perte de valeur de la monnaie », ajoute Véronique Riches-Flores. Or dimanche dernier, la Banque de France a indiqué qu’elle prévoyait une inflation « élevée tout au long de l’année 2022 » à 3,7 % ou 4,4 %.

Facile et pratique

L’or, c’est aussi un placement sûr, très accessible. Quand un achat immobilier requiert un bon dossier, un prêt, un apport, des frais de notaires et des mois d’attente à partir de la signature du compromis de vente, acquérir de l’or nécessite une carte d’identité et quelques minutes dans sa journée. Le prix varie selon son poids et il y en a presque pour tous les porte-monnaies. D’ailleurs, dans les boutiques Godot & Fils, c’est toujours la pièce de Napoléon de 20 francs, aujourd’hui estimée à près de 360 euros, qui a le plus grand succès. « On croise tous les profils d’acheteurs. Ça va des chefs d’entreprise et des traders aux plombiers, serveurs et instituteurs », assure Jonathan Fhal.

L’or est aussi préféré à d’autres matériaux comme l’argent, parce qu’il n’est pas encombrant. Les sociétés de vente proposent même à leurs clients de s’occuper de le leur stocker directement dans leurs coffres ou dans la zone ultra-sécurisée de Port francs, à Genève. Vous pouvez aussi décider de le cacher chez vous, sous un oreiller ou simplement dans un paquet de cigarettes. Eh oui, si l’on a l’habitude de voir des lingots de la taille de briques de construction dans les films, sachez qu’un lingot de 1 kg mesure environ huit centimètres de long sur quatre de large et coûte déjà autour des 60.000 euros.

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